Vos questions/Nos réponses : Enlèvement des ordures ménagères par un établissement public ou une collectivité : la mise en place de la tarification incitative et l’organisation d’un service de collecte en apport volontaire sont-elles compatibles ?
Vos Questions - Nos réponses
Les établissements publics de coopération intercommunale compétents, en vertu de l’article L.2224-13 du code général des collectivités territoriales (CGCT), peuvent instituer, par délibération prise avant le 15 octobre de l’année N pour une application au premier janvier de l’année N+1, « une part incitative de la [Taxe d’enlèvement des ordures ménagères], assise sur la quantité et éventuellement la nature des déchets produits, exprimée en volume, en poids et en nombre d'enlèvements. La part incitative s'ajoute à une part fixe… » (article 1522 bis du code général des impôts (CGI). Dans ce cas, l’EPCI peut également mettre en place un tarif différent en fonction de la nature des déchets produits (verres, carton, papier, plastiques et déchets organiques) (Rép. Min. n° 3618, JO AN, 3 mars 2003, p. 1631). Le tarif de la part incitative est fixé chaque année par délibération de manière à ce que son produit soit compris entre 10 % et 45 % du produit total de la taxe.
Les modalités d’identification et de suivi des producteurs de déchets doivent alors être mises en place. En effet, l’organisation du service d’enlèvement des ordures ménagères doit prévoir les dispositifs techniques, les équipements, permettant d’individualiser la production de déchets afin de pouvoir mesurer les quantités produites. Plusieurs options peuvent être envisagées dans cette optique : l’acquisition de bacs de collectes individuels avec puces, la mise en place de points d’apport volontaire avec contrôle d'accès et ouverture avec badge, etc.
Néanmoins, en vertu de l’article R.2224-24 du CGCT, dans les zones agglomérées de plus de 2 000 habitants, c’est-à-dire toute zone au tissu bâti continu ne présentant pas de coupure de plus de 200 mètres entre deux constructions (article R.2224-23), « les ordures ménagères résiduelles sont collectées au moins une fois par semaine en porte à porte » tandis que dans les autres zones cette collecte doit être opérée « au moins une fois toutes les deux semaines ».
Un assouplissement, ouvert par le quatrième alinéa de l’article précité, demeure possible puisque ces dispositions ne trouvent pas à s’appliquer « dans les zones où a été mise en place une collecte […] par apport volontaire, dès lors que cette collecte offre un niveau de protection de la salubrité publique et de l’environnement ainsi qu’un niveau de qualité de service à la personne équivalents à ceux de la collecte en porte à porte ».
Comme souligné par le tribunal administratif de Lyon (n° 2101429 du 6 octobre 2022), il résulte donc de ces dispositions que sous réserve du respect des conditions posées au IV de cet article, une collectivité ou un établissement public en charge du traitement et de la collecte des ordures ménagères peut supprimer la collecte des ordures ménagères en porte à porte.
Sur ce point, le tribunal administratif de Nantes a pu juger que les conditions de protection de la salubrité publique et de l’environnement et de maintien d’un niveau de qualité de service public étaient remplies lorsqu’un « dispositif dual combinant collecte en porte à porte au minimum tous les quinze jours et libre apport en points d'apports volontaires » était mis en place (CAA de Nantes, 7 janvier 2022, n° 20NT03908). A l’inverse, le défenseur des droits a pu souligner qu’une collectivité supprimant totalement le dispositif de collecte en porte à porte au profit d’une collecte par apport volontaire n’assurait pas un niveau de qualité de service à la personne équivalent à la collecte en porte à porte, notamment s’agissant des personnes rencontrant des difficultés de déplacement (Décision du Défenseur des droits n° 2019-157 du 21 juin 2019).
A noter que si l’appréciation par la jurisprudence des termes du quatrième alinéa de l’article R.2224-24 peut apparaitre très stricte, la doctrine semble avoir une vision plus large. Selon le professeur Bernard Poujade, l'administration dispose d'une marge d'appréciation pour décider des modalités et des moyens qu'elle consacre à ses services publics. À cet égard, nul ne dispose de manière générale d'un droit particulier à l'adaptation du service public à sa propre situation comme en témoigne, par exemple, la règle selon laquelle les usagers n'ont pas de droit au maintien acquis de la réglementation antérieure ou plus explicitement encore la conception française du principe d'égalité qui, s'il oblige à traiter pareillement des personnes placées dans des situations identiques, n'impose pas de traiter différemment des personnes se trouvant dans des situations différentes (Bulletin juridique des collectivités locales n° 1 du 1er janvier 2023).
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