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    Mise en location gérance d'un fonds de commerce ayant fait l'objet d'une acquisition amiable par une commune

    Dans une démarche visant à maintenir des commerces de proximité une commune peut décider de procéder à l’acquisition amiable d’un fonds de commerce et le mettre ensuite en location gérance.

    La mise en œuvre de ces possibilités doit toutefois s’opérer selon des modalités particulières et dans le souci d’éviter certains écueils.

    L’acquisition à l’amiable d’un fonds de commerce

    Pour rappel, le fonds de commerce désigne l'ensemble des éléments mobiliers corporels (matériel[1], outillage, marchandises[2], etc.) et incorporels (clientèle[3], droit au bail, nom commercial, enseigne, droit de propriété industrielle, licences et autorisations administratives[4], etc.) qu'un commerçant rassemble et organise en vue de la recherche et de l'exploitation d'une clientèle, et qui constitue une entité juridique distincte des éléments qui la composent.

    Il n’inclut pas les murs du commerce (Cass. com. 31 mars 2009, n° 08-14.180), ni - en principe - les dettes et les créances potentiellement rattachées au fonds.

    Rien ne s’oppose à l’acquisition amiable d’un fonds de commerce par une commune, en dehors de l’exercice du droit de préemption commercial prévu aux articles L.214-1 à L.214-3 du code de l'urbanisme.

    La décision de l’acquisition, par la commune, d’un fonds de commerce, ainsi que des conditions s’y attachant, revient au conseil municipal. Ce dernier est en effet chargé de régler, par ses délibérations, les affaires de la commune (article L.2121-29 alinéa 1).

    La vente d’un fonds de commerce doit s’opérer dans le respect des dispositions du code de commerce (articles L.141-2 à L.14132) et de celles du code civil relative à la validité des contrats (articles L.1128 à 1171).

     

    Par ailleurs, il est à noter que dans le cas où il s’agit d’un bar ou d’un restaurant, les licences de boisson, qui font partie des éléments incorporels du fonds de commerce, se trouvent compris, en cas de vente de ce dernier, dans la cession sauf convention contraire des parties.

    Conformément aux articles L.141-12 et suivants du code du commerce, cette cession doit être obligatoirement publiée. L’objet étant de protéger les créanciers du cédant en leur permettant de s’opposer au paiement du prix dans un délai de 10 jours après la publication au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales - BODACC (article L.141-14 C. com.). Lorsque la cession du fonds s’opère par acte sous seing privé, cet acte, pour être valablement publié, doit préalablement avoir été enregistré, sans délai, au service fiscal de l’enregistrement[5]. A défaut d’enregistrement préalable, la publication est entachée de nullité (article L.141-13 C. com.). Lorsque la vente intervient par acte authentique, le délai d’enregistrement est d’un mois à compter de la signature de cet acte.

    La publication, qui doit être effectuée à la diligence de l’acquéreur dans un délai de 15 jours à compter du jour de la signature de l’acte de cession, prend la forme d’un extrait ou d’un avis au BODACC et sur un support habilité à recevoir des annonces légales dans le département dans lequel le fonds est exploité (article L.141-12 C. com.). En cas de non-respect, la sanction est, comme il vient d’être dit, l’inopposabilité du paiement du prix aux créanciers du cédant, l’acquéreur s’exposant alors au risque de payer le prix une seconde fois à ces créanciers (article L.141-17 C. com[6]).

    Une fois le fonds de commerce acquis la commune a ensuite la possibilité de le mettre en location gérance.

    La mise en location gérance du fonds acquis par la commune

    La location-gérance est le contrat par lequel le propriétaire ou l'exploitant d'un fonds de commerce en concède totalement ou partiellement la location à un gérant qui l'exploite à ses risques et périls (article L.144-1 C. com.).

    La décision de mettre un fonds de commerce, acquis par la commune, en location gérance revient en principe au conseil municipal.

    Toutefois, l’article L.2122-22 du CGCT prévoit que « Le maire peut (…) par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (…) 5° De décider de la conclusion et de la révision du louage de choses pour une durée n'excédant pas douze ans ». Or la location-gérance est une variété de louage de chose : c'est la location d'un meuble incorporel[7] moyennant le paiement d'un prix, ce qui correspond à la définition que donne le code civil (article 1709) de ce contrat.

    Il apparait donc que les dispositions de l’article L.2122-22, 5° du CGCT autorisent le maire à conclure un contrat de location-gérance lorsque le conseil municipal l’a habilité à décider de la conclusion et de la révision du louage de choses.

    En cas de mise en location-gérance, la commune doit éviter l’écueil d’une requalification du contrat en concession. Une concession de service constitue en effet un contrat de la commande publique qui ne peut en principe être conclu qu’après publicité et mise en concurrence préalable.

    Il faut, pour la commune éviter de mettre à la charge du locataire des obligations qui ne se trouvent habituellement pas dans un contrat de location-gérance (par ex. l’obligation de proposer certains types de services à la population ou tel type de produits aux clients).

    En pratique, les obligations prévues par le contrat de location devront donc se limiter à ce que le locataire-gérant (Cf. le modèle de contrat mentionné au point 2.4) :

    - exploite le fonds personnellement, de manière paisible, en « bon commerçant » et en se conformant aux lois et règlements en vigueur ;

    - ne change pas la destination de ce fonds ;

    - entretienne les lieux pendant la durée du contrat ;

    - s’assure pour l’exercice de son activité ;

    - gère les livres de commerce et tienne une comptabilité régulière ;

    - s’acquitte des impôts et taxes liés à l’exploitation du fonds.

    Tout comme la cession du fonds, la location-gérance est également soumise à des obligations de publicité :

    - le locataire-gérant, qui a la qualité de commerçant, est soumis « à toutes les obligations qui en découlent » (article L.144-2 C.com.) et notamment celle de s'immatriculer au registre du commerce et des sociétés ; mention de la location-gérance devant y figurer (article R.123-38, 8° C. com.).

    - le contrat de location-gérance publié dans la quinzaine de sa date sous forme d'extraits ou d'avis dans un journal habilité à recevoir les annonces légales. Cet avis doit comporter tous les renseignements susceptibles d'intéresser les tiers[8]. La fin de la location-gérance donne lieu aux mêmes mesures de publicité, c'est-à-dire la publication, dans la quinzaine de la cessation, sous forme d'extraits ou d’avis dans un journal d'annonces légales, de cette fin d’activité (article R.144-1 C. com.).

    Le retard dans l'accomplissement de ces formalités, comme leur inobservation, peut avoir des conséquences financières non négligeables pour les parties. En effet, jusqu'à la publication du contrat de location-gérance, « le loueur du fonds est solidairement responsable avec le locataire-gérant des dettes contractées par celui-ci à l'occasion de l'exploitation du fonds » (article L.144-7 C.com.).

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    [1] Le matériel est le mobilier commercial servant à l'exploitation du fonds de commerce, notamment à l'agencement d'un magasin.

    [2] Les marchandises peuvent être définies comme tous les biens destinés à la vente.

    [3] C’est l'élément essentiel du fonds de commerce, sans laquelle celui-ci ne saurait exister. Tous les autres servent à la constituer et à la retenir.

    [4] Les licences et autorisations administratives sont parfois des éléments du fonds de commerce et peuvent être comprises dans sa transmission. Il en va ainsi des licences des débits de boissons, élément incorporel du fonds de commerce qui, en cas de vente de ce dernier, se trouvent comprises dans la cession, sauf convention contraire des parties.

    [5] Cet enregistrement nécessite la fourniture de l’acte de cession du fonds de commerce en 2 exemplaires ; du formulaire de déclaration de mutation de fonds de commerce en 3 exemplaires ; du formulaire de déclaration de l'état du matériel et des marchandises cédées en 3 exemplaires et le règlement des droits d'enregistrement.

    [6] Cet article prévoit la même sanction en cas de paiement du fonds au vendeur avant l’expiration du délai précité de 10 jours.

    [7] Cass. com., 16 février 1993 : Bull. civ. 1993, IV, n° 63

    [8] Précisons qu’en cas de tacite reconduction, il n'y a pas lieu de renouveler les formalités de publicité prévues par la loi lors de la conclusion du contrat de location - gérance (Cass. com., 7 juill. 1966 : JCP 1966, II, 14842).



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    Paru dans :

    ATD Actualité n°333

    Date :

    1 novembre 2023

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