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    La régulation des meubles de tourisme

    Avec le développement des plateformes de réservation en ligne, les locations meublées s’intensifient sur certains territoires.

    Pour faire face à ce phénomène, et à ses conséquences pour leur territoire et leurs habitants, les communes concernées, inquiètes ressentent le besoin de réguler le système.

    Or, cette régulation des locations meublées par les communes est strictement encadrée par les codes du tourisme et de la construction et de l'habitation.

    Par ailleurs, la proposition de loi visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif, devait faire l’objet d’une commission mixte paritaire pour son adoption définitive. La discussion autour du texte a été interrompue du fait de la dissolution de l’Assemblée nationale : les mesures prévues par cette proposition de loi n’ont donc pas été adoptées.

    Notons enfin que la décision du Conseil d’Etat du 8 juillet dernier devrait avoir un impact sur la législation des meublés de tourisme.

    En effet, le Conseil d’Etat a mis fin à la « niche fiscale » dont pouvait bénéficier les propriétaires de locations meublées de courte durée type Airbnb, sous couvert de la doctrine fiscale, à savoir l’application d’un abattement de 50 % quand les revenus n’excédaient pas 77 700 € (voire 71 % jusqu’à 188 700€ pour les meublés de tourisme classés) sur les revenus locatifs 2023, déclarés en mai 2024. Cependant, la décision du Conseil d’Etat n’est pas rétroactive et n’a pas de conséquence sur les contribuables ayant déclaré leurs revenus 2023 dans les délais (Conseil d'État, section du contentieux, 8e chambre, n° 492382, décision du 8 juillet 2024).

    LOBLIGATION DE DÉCLARATION PRÉALABLE DES MEUBLÉS DE TOURISME, EXCEPTION FAITE DES MEUBLÉS SERVANT DE RÉSIDENCE PRINCIPALE AU LOUEUR

    Sont définis comme des « meublés de tourisme » au sens de l’article D.324-1 du code du tourisme « les villas, appartements, ou studios meublés, à l'usage exclusif du locataire, offerts en location à une clientèle de passage qui y effectue un séjour caractérisé par une location à la journée, à la semaine ou au mois, et qui n'y élit pas domicile ».

    Il est obligatoire de déclarer la location d’un meublé de tourisme en mairie – à l’exception des meublés de tourisme constituant la résidence principale du loueur – dans toute commune préalablement à sa location, en remplissant le formulaire CERFA n° 14004. Cette déclaration peut également être effectuée en ligne, par le biais d’un téléservice accessible sur le site internet « Service-public.fr » (article L.324-1-1 du code du tourisme).

    Pour rappel, la notion de résidence principale s’entend de « tout logement occupé au moins huit mois par an, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure, soit par le preneur ou son conjoint, soit par une personne à charge au sens du code de la construction et de l’habitation » (article 2 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs).

    Ainsi, un logement loué plus de 120 jours par an (soit un total de quatre mois) ne peut être considéré comme une résidence principale et est soumis à déclaration préalable obligatoire.

    Le fait de ne pas déclarer la location d’un meublé de tourisme est puni d’une amende de 450 euros au plus (article R.324-1-2 du code du tourisme).

    En résumé, il est obligatoire de déclarer l’existence d’un meublé de tourisme à la mairie de la commune où est situé l’immeuble, et ce quelle que soit la commune, exception faite des locations au sein de locaux servant de résidence principale au loueur.  Cette obligation ne permet toutefois pas de réguler la création des meublés de tourisme, contrairement aux procédures énumérées à la suite.

     

    LA POSSIBILITÉ D’INSTAURER UN RÉGIME D’AUTORISATION PRÉALABLE AU CHANGEMENT D’USAGE DES LOCAUX


    Principe et communes concernées

    Le Code de la Construction et de l’Habitation (CCH) autorise, dans certaines communes, le conseil municipal à instituer un régime d’autorisation préalable à tout changement d’usage de locaux.

    Pour les communes concernées, il s’agit en particulier de pouvoir réguler la création de meublés de tourisme en soumettant à autorisation la transformation d’un local à usage d’habitation, donc d’un logement, en local destiné à un tout autre usage (usage de meublé de tourisme, usage commercial, de service…  – article L.631-7 du CCH). Toutefois, tous les changements d’usage sont concernés, cette procédure ne se limitant pas à la transformation des logements en meublés de tourisme ; ainsi est par exemple soumis à autorisation la transformation d’un local commercial en logement.

     Actualité jurisprudentielle

    Cour de cassation, 3e civ. du 27-06-2024 n° 23-13.131 – La décision de classement en meublé de tourisme prévue par l’article L.324-1 du code du tourisme ne peut se substituer à l’autorisation de changement d’usage prévue par l’article L.631-7 du CCH.

    La notion de changement d’usage ne doit pas être confondue avec le changement de destination au sens du code de l’urbanisme : l’usage s’entend « de la manière dont le local est utilisé » (locaux à usage d’habitation ou non), tandis que la destination s’entend de « la raison pour laquelle un bâtiment a été construit »1 et concerne l’opération de construction au sens du code de l’urbanisme.

    Le but d’un tel régime d’autorisation est de préserver le logement permanent en complexifiant la location, dans des communes faisant face à une pénurie ou des tensions en la matière.

    Du fait de son caractère contraignant, cette procédure ne peut être mise en place que dans certaines communes et plus spécifiquement au sein des communes situées en zone « tendue », c’est-à-dire notamment « dans les communes appartenant à une zone d'urbanisation continue de plus de cinquante mille habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements entraînant des difficultés sérieuses d'accès au logement sur l'ensemble du parc résidentiel existant, qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d'acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d'emménagements annuels dans le parc locatif social » (article 232 du code général des impôts (CGI)).2

    Pour les communes visées par l’article 232 du CGI, une telle procédure d’autorisation préalable au changement d’usage peut être instituée par délibération de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme ou, à défaut, du conseil municipal (article L.631-9 du CCH).

    L’organe délibérant compétent devra, par délibération, définir un règlement fixant les conditions de délivrance des autorisations de changement d’usage de locaux d’habitation spécifique à la commune (article L.631-7-1 du CCH, dernier alinéa).

    Régimes possibles et conditions

    Le code de la construction et de l’habitation prévoit plusieurs régimes possibles en ce qui concerne la réglementation du changement d’usage :

    • Le régime « général » d’autorisation préalable au changement d’usage de tout local (article L.631-7-1 du CCH) : dans ce cadre, le changement d’usage de tout local, notamment en meublé de tourisme, est subordonné à l’obtention d’une autorisation administrative préalable (exception faite des résidences principales, à condition que celles-ci ne soient louées au maximum que 120 jours par an).

    Les conditions de délivrance de ces autorisations sont déterminées par délibération du conseil municipal.

    Ce régime peut être complété par une mesure dissuasive de compensation, dans les conditions prévues par l’article L.631-7-1 du CCH. Concrètement, il s’agit de subordonner l’autorisation préalable au changement d’usage « à une compensation sous la forme de la transformation concomitante en habitation de locaux ayant un autre usage » (article L.631-7-1 du CCH), ou à une compensation sous la forme de l’achat de droits de commercialité auprès d’un tiers, lequel transformera des locaux à usage autre que d’habitation lui appartenant en logements3

    • Le régime d’autorisation temporaire de changement d’usage dont le but est de permettre la location « pour de courtes durées des locaux destinés à l'habitation à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile» par une personne physique (article L.631-7-1 A du CCH) : l’idée est ici de réglementer la location d’une résidence secondaire uniquement pour une courte durée, soumise à renouvellement limitée, et uniquement dans le cas
    • où le loueur est une personne physique (réglementation des meublés de tourisme de type Airbnb gérés par des particuliers4 ;

     

    • Un régime de déclaration préalable permettant d’affecter temporairement à l’habitation des locaux destinés à un usage autre que l’habitation pour une durée maximale de quinze ans (article L.631-7-1 B du CCH) : ce second régime vise à apporter de la souplesse en soumettant à une simple déclaration le fait de louer à usage d’habitation et temporairement un local à usage autre que d’habitation, pour une durée limitée, sans être nécessairement soumis à une autorisation administrative préalable. Ce système vise notamment à permettre aux propriétaires de locaux de créer du logement par la transformation temporaire de bureaux vacants, notamment, par dérogation au système de droit commun5

    Il convient de souligner que la mise en place de ces différents régimes d’autorisation et/ou de déclaration par délibération du conseil municipal est soumise à conditions et doit ainsi :

    • Être motivée et proportionnée : la délibération prise en ce sens doit être suffisamment motivée et « démontrer de manière objective que la collectivité subit des tensions sur le marché du logement»6]. Le but de cette motivation est de prouver la nécessité de mettre en place le régime d’autorisation préalable au regard de la pénurie de logements, en se fondant sur des indicateurs fiables et solides tels que, par exemple, les prix des loyers et de l’immobilier particulièrement élevés par rapport à d’autres communes de taille comparable (TA Melun, ord. n° 2208697 du 31 octobre 2022 : sur la nécessité de démontrer l’existence d’une raison impérieuse d’intérêt général tenant à la lutte contre la pénurie de logements destinés à la location pour mettre en place un tel dispositif, sous peine de suspension, voire d’annulation) ;

     

    • Respecter le principe de sécurité juridique : il s’agit de permettre aux administrés souhaitant procéder à un changement d’usage de leurs locaux de s’adapter progressivement à ce nouveau régime d’autorisation (par exemple, en instaurant une période transitoire de quelques mois avant sa mise en œuvre) – sous peine d’annulation par le juge administratif (CAA Lyon, 1er juin 2021, n° 19LY03088 : sur la mise en œuvre d’une telle réglementation à l’issue d’une période transitoire d’un mois seulement).

    Les sanctions applicables en cas d’irrespect de ces dispositifs sont présentées au sein du Guide pratique de la réglementation des meublés de tourisme à destination des communes (p. 18).

    Comme évoqué précédemment, la commune ou l’EPCI compétent en matière de PLU peut instaurer un dispositif d’autorisation préalable au titre du code de la construction et de l’habitation.

    Toutefois, ces procédures ne pourront être mises en œuvre qu’en présence de tensions réelles sur le marché du logement local, rendant réellement nécessaires leur adoption, afin de pouvoir les motiver correctement. Dans le cas contraire, il existe un risque juridique sérieux d’annulation de la délibération instaurant une ou plusieurs de ces procédures.

    En outre, ces procédures nécessitent des moyens d’instruction importants. A titre d’exemple, dans le cadre du changement d’usage, sont réglementés et soumis à autorisation tous les changements d’usage : la transformation d’un logement en commerce, par exemple, sera elle-aussi réglementée et soumise à autorisation.

    LA POSSIBILITÉ D’INSTAURER UN NUMÉRO D’ENREGISTREMENT DES MEUBLÉS DE TOURISME POUR S’ASSURER DU RESPECT DE LA RÉGLEMENTATION

    Outre les procédures d’autorisation de changement d’usage d’un local et de déclaration préalable d’affectation temporaire au logement, le code du tourisme prévoit un dispositif supplémentaire consistant à délivrer un numéro d’enregistrement à tous les loueurs de meublés de tourisme situés sur le territoire communal (article L.324-1-1 du code du tourisme).

     

    Actualité jurisprudentielle 

    Cour de cassation, 3e civ. du 27-06-2024 n° 23-13.567 - L'obligation de déclaration préalable soumise à enregistrement de toute location d'un meublé de tourisme prévue par l'article L.324-1-1, III, du code du tourisme, s'impose quel que soit l'usage du local au sens de l'article L.631-7 du CCH.

    Cette dernière procédure ne peut être mise en place que dans les communes où le régime de changement d’usage des locaux destinés à l’habitation est soumis à autorisation préalable au sens des articles L.631-7 et L.631-9 du CCH (régime général des autorisations préalables).

    Le but est ici de permettre le contrôle du respect de la réglementation en matière de meublés de tourisme, mais aussi d’appréhender l’étendue du phénomène sur le territoire communal.

    Cette procédure présente l’intérêt de soumettre à déclaration préalable pour enregistrement les meublés de tourisme constituant la résidence principale du preneur, contrairement aux autres régimes préalablement mentionnés (type Airbnb).

    Néanmoins, la délivrance du numéro d’enregistrement place la commune instigatrice en situation de compétence liée, puisque cette dernière doit délivrer le numéro d’enregistrement, sans marge d’appréciation, par le biais d’un téléservice (article D.324-1-1 du code du tourisme, II). Dès lors, les loueurs et toute plateforme de location doivent mentionner le numéro d’enregistrement sur toute annonce relative au bien (article L.324-2 du code du tourisme).

    En termes de sanction, le non-respect de la procédure de numéro d’enregistrement dans les communes l’ayant instituée est puni des amendes dont le montant est prévu par les articles L.324-1-1 et suivants du code du tourisme.

    En résumé, la déclaration préalable soumise à enregistrement des meublés de tourisme, peu importe leur caractère de résidence principale du loueur, peut être mise en place dans certaines communes, à condition qu’ait été mis en place un régime d’autorisation préalable au changement d’usage.

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    Complément de lecture

    - Guide pratique de la réglementation des meublés de tourisme à destination des communes, Ministère chargé du logement, janvier 2022 (www.ecologie.gouv.fr, 28 pages).

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    1 Guide pratique de la réglementation des meublés de tourisme à destination des communes, Ministère chargé du logement, janvier 2022, p. 13

    2Pour connaître la liste des communes se trouvant en zone dite « tendue », il convient de se référer au décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 relatif au champ d'application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l'article 232 du code général des impôts.

     

    3 Voir en ce sens la fiche d’application de la mairie de Toulouse concernant l’Acquisition de titres de commercialité, disponible à l’adresse : https://metropole.toulouse.fr/sites/toulouse-fr/files/2023-11/fiche-commercialite.pdf

    4Voir en ce sens l’article 4 du Règlement relatif aux autorisations de changement d’usage des locaux d’habitation et des locaux commerciaux applicable sur le territoire de la Ville de Toulouse, p. 3 : https://metropole.toulouse.fr/sites/toulouse-fr/files/2023-11/reglement-01-11-2023.pdf

    5 Voir en ce sens l’article Le contrôle du changement d’usage des locaux d’habitation face à l’évolutivité des immeubles, 5 pages : https://www.cheuvreux.fr/wp-content/uploads/2018/10/LCDJ-1_2.-Le-contr%C3%B4le-du-changement-dusage-des-locaux-dhabitation-face-%C3%A0-l%C3%A9volutivit%C3%A9-des-immeubles.pdf

    6Guide pratique de la réglementation des meublés de tourisme à destination des communes, Ministère chargé du logement, janvier 2022, p. 14.



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    Paru dans :

    ATD Actualité n°341

    Date :

    1 août 2024

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