Quelle est la règlementation applicable en matière de création et de fonctionnement de budget annexe "photovoltaïques " ?
22/08/2024
Dans un contexte de forte augmentation des prix de l’énergie et afin de répondre à la nécessité de transition écologique, de nombreux adhérents sollicitent HGI/ATD afin de bénéficier d’informations s’agissant de la mise en place de panneaux photovoltaïques. Cette Fiche Technique a pour but de rappeler la règlementation applicable concernant la création des budgets annexes retraçant les opérations financières et comptables spécifiques à ce type de service.
Comme rappelé par une réponse ministérielle[1], l’activité de production et de distribution d’énergie est une activité constitutive d’un service public industriel et commercial (SPIC). Cette activité, lorsqu’elle est gérée directement par la collectivité, fait l’objet de la création d’une régie.
La création d’une régie
L’article L.2221-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) dispose que « les communes […] peuvent exploiter directement des services d’intérêt public à caractère industriel ou commercial ». La gestion directe de ce service entraine l’obligation de créer soit une régie disposant de la seule autonomie financière soit une régie à personnalité morale et autonomie financière (article L.2221-4 du CGCT). La création de cette régie doit faire l’objet d’une délibération de l’assemblée délibérante.
Les régies dotées de la personnalité morale et de l’autonomie financière sont des établissements publics locaux (article L.2221-10 du CGCT). Elles sont administrées par un conseil d’administration et un directeur désignés sur proposition du Maire ou du Président d’EPCI.
La régie dotée de la seule autonomie financière est administrée, sous l’autorité de l’exécutif et de l’assemblée délibérante, par un conseil d’exploitation ainsi qu’un directeur (article L.2221-14 du CGCT). Le conseil d'exploitation délibère sur les catégories d'affaires pour lesquelles l’assemblée délibérante ne s'est pas réservée le pouvoir de décision. A noter qu’en vertu de l’article R.2221-65 du CGCT, dans les communes de moins de 3 500 habitants, le conseil d’exploitation peut être le conseil municipal. Dans une telle situation, la présidence du conseil d’exploitation peut être assurée par le maire ou par l’un de ses membres désignés par le maire.
Pris pour l’application de ces dispositions, l’article R.2221-1 du CGCT énonce que la délibération par laquelle le conseil municipal décide la création d’une régie fixe les statuts et le montant de la dotation initiale de la régie. Cette dernière a pour objet de mettre à disposition du SPIC nouvellement créé les moyens matériels et financiers nécessaire à son fonctionnement initial. Elle peut être faite en nature, en numéraire ou consister en un transfert d’emprunt.
En outre, la collectivité ne peut subventionner librement le service (sauf cas dérogatoires) et ne peut pas prendre en charge les dépenses et recettes afférentes à cette activité dans son budget principal.
Ces opérations doivent être individualisées dans un budget annexe.
Toutefois, conformément à l'article 88 de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables codifiée dans l’article L1412-1 du CGCT, l'obligation d'un budget annexe n'est pas requise en deçà d’un certain seuil de puissance. Ce seuil est fixé à 1 MW cumulé par collectivité (arrêté du 10 juillet 2024 relatif aux critères de l'article L. 1412-1 du code général des collectivités territoriales pour les opérations d'autoconsommation collective).
L’établissement d’un budget annexe
La création d’un budget annexe relève d’une décision de l’assemblée délibérante. Une délibération devra être prise afin d’acter la création du budget annexe « production d’énergie photovoltaïque ». Ce vote devra intervenir avant le 31 décembre de l’année N pour une création au 1er janvier de l’année N+1.
A noter que si l’activité de production d’énergie est classiquement retracée dans un budget appliquant la nomenclature M41, l’activité de production d’énergie photovoltaïque fait l’objet d’un suivi au sein d’un budget appliquant la nomenclature M4, lorsque l’énergie produite est destinée à être revendue partiellement ou totalement à ERDF.
S’agissant du vote du budget primitif (BP) du budget annexe, il ne pourra intervenir qu’au moment du vote du budget principal de la collectivité. En effet, en vertu du principe d’unité budgétaire, le juge administratif a rappelé que le budget annexe n’a « pas pour objet ou pour effet de rendre le budget spécial du service indépendant du budget de la [collectivité] auquel il est annexé »[2].
Dans l’hypothèse d’une régie dotée de la seule autonomie financière, le budget est préparé par le directeur et soumis en premier lieu pour avis au conseil d’exploitation. Dans un second temps, le Maire/Président présente le budget à l’assemblée délibérante qui le vote. Il constitue un budget annexe au budget principal de la collectivité et les opérations budgétaires ainsi que la comptabilité et la trésorerie du service demeurent distinctes de celles de la commune ou de l’EPCI. L’exécution du budget donne lieu à l’émission de titres et de mandats dans des séries de bordereaux distinctes de celles du budget principal.
Le budget annexe M4 ainsi créé devra répondre à certaines spécificités s’agissant notamment du nécessaire équilibre entre les recettes et les dépenses liées au service.
Les spécificités d’un budget annexe appliquant la nomenclature M4
Le budget annexe doit rassembler l’ensemble des dépenses et recettes de l’activité, y compris le remboursement des charges indirectes d’administration générale inscrites au budget principal. La section de fonctionnement (ou d’exploitation) devra notamment retracer les charges de gestion, les produits de vente d’électricité, les frais d’assurance, les amortissements. La section d’investissement fera apparaitre les dépenses d’installation des panneaux photovoltaïque, les emprunts souscrits ou encore les subventions reçues et leurs amortissements[3].
Cette activité étant constitutive d’un SPIC, le budget retraçant ses opérations doit être équilibré en dépenses et en recettes. L’article L.2224-2 du CGCT interdit en effet aux communes de prendre en charge dans leur budget propre des dépenses au titre de ces services publics à caractère industriel et commercial (sauf cas particuliers). A ce titre, la dotation initiale de la régie ne doit pas prendre en charge des dépenses incombant à la régie pour ne pas contrevenir à ce principe d’équilibre.
Outre la mise en place d’une régie et la création d’un budget annexe dédié, il convient de s’attarder sur la mise en place du service, notamment l’exécution des premières opérations comptables avant le vote du premier budget primitif.
Le fonctionnement du budget annexe « production d’énergie photovoltaïque »
L’exécution des dépenses et recettes de fonctionnement dans l’attente du vote du budget primitif
Postérieurement à la création de la régie et du budget annexe et, dans l’attente du vote du budget primitif, les dépenses et les recettes de fonctionnement afférentes au service de production d’énergie photovoltaïque seront réalisées sur le budget principal. En règle générale, ces dépenses sont réalisées dans la limite des « crédits inscrits au budget de l’année précédente » s’agissant des charges de fonctionnement et pour le « quart des crédits ouverts au budget de l’exercice précédent, non compris les crédits afférents au remboursement de la dette » (sur délibération de l’assemblée délibérante) concernant les charges d’investissement (article L.1612-1 du CGCT).
Dans le cas d’une création de budget annexe, n’ayant aucun exercice antérieur auquel se référer, l’exécution comptable relative à ce BA sera réalisée, dans l’attente du vote du budget primitif (BP), sur le budget principal.
Après le vote du BP, la commune devra procéder à des écritures de refacturation entre les deux budgets. Une délibération devra être jointe au vote du budget primitif précisant les dépenses et recettes faisant l’objet de cette refacturation. S’agissant des remboursements de frais autres que les charges de personnel, un mandat devra être émis au compte 62871 « remboursement de frais à la collectivité de rattachement » du budget annexe tandis qu’un titre sera émis au compte 70872 « remboursement de frais par le budgets annexes et les régies municipales » du budget principal.
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Bénéficiaire de la mise à disposition |
Remettant à disposition |
Budget Principal |
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70872 Remboursement de frais par les budgets annexes et les régies municipales |
Budget Annexe |
62870 Remboursement de frais à la collectivité de rattachement |
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Tableau extrait du guide des flux financiers réciproques dans le secteur public local
Le recours à la procédure d’affectation
La procédure d’affectation permet à une collectivité de transférer à un tiers la jouissance d’un bien avec tous les droits et obligations qui s’y rapportent (entretien et amortissements).
Ainsi, une collectivité peut, dans l’attente de la création du budget annexe et du vote de son budget primitif, souscrire un emprunt correspondant au coût d’un bien et procéder à son acquisition. Lors de la création du budget annexe, la commune affecte à ce dernier le bien à sa valeur initiale, le capital d’emprunt restant dû ainsi que les amortissements effectués.
En pratique, des écritures d’ordre interviendront dans le budget principal (BP) de la commune et dans le budget annexe (BA) :
- Dans le budget principal : le bien acquis (auquel un numéro d’inventaire a été attribué) est affecté au BA pour sa valeur comptable historique (sortie du bien des immobilisations dont la commune a la jouissance et affectation du capital correspondant à la valeur comptable historique du bien), les amortissements effectués sont transférés de même que le capital restant dû (CRD) de l’emprunt
- Dans le budget annexe : enregistrement du bien pour sa valeur comptable historique (entrée du bien dans les immobilisations dont le service a la jouissance et inscription dans le patrimoine pour la valeur nette comptable du bien), affectation des amortissements effectués et enregistrement de l’affectation du CRD de l’emprunt
Le comptable public procèdera à la comptabilisation de cette opération au vu des pièces justificatives transmises par l’ordonnateur. En effet, afin que l’inventaire de la collectivité soit concordant avec l’état de l’actif, l’exécutif devra émettre un certificat administratif à destination de son comptable public assignataire précisant les informations nécessaires pour chacun des biens à inscrire (localisation du bien, valeur nette comptable, numéro d’inventaire…).
Le virement de l’excédent du budget annexe vers le budget principal
Si les virements entre budget principal et budget annexe sont en théorie interdits, ils demeurent possibles, sur dérogations, pour les SPIC s’agissant de l’excédent d’exploitation du budget annexe vers la section de fonctionnement du budget principal.
En effet, l’article R.2221-48 du CGCT organise la possibilité d’un reversement exceptionnel de l’excédent d’exploitation d’un budget annexe vers le budget principal. Cet excédent doit financer les mesures d’investissement à hauteur des plus-values d’éléments d’actifs puis, pour le surplus, à la couverture du besoin de financement de la section d’investissement apparu à la clôture de l’exercice précédent. Enfin, il peut financer des dépenses d’exploitation ou d’investissement, être affecté en report à nouveau au budget annexe ou reversé « à la collectivité locale de rattachement ».
Dans ce dernier cas de figure, la jurisprudence ne fixe pas d’ordre de priorité. Toutefois, elle considère que "le conseil municipal ne saurait, sans entacher sa délibération d’une erreur manifeste d’appréciation, décider le reversement au budget général des excédents du budget annexe d’un SPIC qui seraient nécessaires au financement des dépenses d’exploitation ou d’investissement devant être réalisées à court terme"[4]. Ainsi, il convient de s’assurer, avant de procéder à un transfert vers le budget principal, que toutes les possibilités d’affectation destinées à couvrir les dépenses propres au service ont été examinées[5].
En revanche, les transferts entre la section d’investissement d’un des deux budgets (principal ou annexe) vers la section de fonctionnement de l’autre budget ne sont pas autorisés.
[1] Réponse à la question écrite n° 01445 du ministre de la cohésion de territoires et des relations avec les collectivités territoriales – publiée au JO Sénat du 14 février 2019
[2] Conseil d’Etat, 25 février 1998, Préfet de Haute-Corse
[3] http://crer.info/wp-content/uploads/2019/01/guide-photovoltaique-collectivite-CRER.pdf
[4] Conseil d’Etat, 9 avril 1999, « Commune de Bandol »
[5] AMF – Le reversement de l’excédent d’un budget annexe vers le budget général
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