Jurisprudence : Un maire peut-il interdire les cirques détenant des animaux sauvages dans sa commune ?
Jurisprudence - Cour administrative d'appel, 21 mars 2023, n°20VE03238
Faits :
Par arrêté, un maire a interdit sur le territoire de sa commune l’installation des cirques détenant des animaux sauvages en vue de leur présentation au public, « motif pris des conditions de détention imposées à ces animaux qui seraient contraire à leurs besoins biologiques, et de la nécessité de garantir la moralité publique en évitant toute atteinte aux valeurs de respect de la nature et de l'environnement. Cet arrêté est également motivé par le souhait de promouvoir les cirques sans animaux et la pédagogie auprès des habitants de la ville, en particulier les jeunes, sur les conditions de vie des animaux dans les cirques. Pour justifier du bien-fondé de cet arrêté, la commune (…) invoque un risque de troubles, d'une part à la morale publique, en raison de l'indignité de la condition dans laquelle les animaux sont maintenus et du spectacle qui en résulte, notamment auprès d'un jeune public, et d'autre part à la sécurité publique, en raison du contexte local de forte opposition à de tels spectacles. »
La Fédération des cirques de tradition et propriétaires de spectacles et l’association de défense des cirques de famille ont demandé au tribunal administratif d’annuler la décision implicite de rejet de leur recours gracieux tendant à l’abrogation de cet arrêté. Le tribunal administratif a fait droit à leur demande. La commune fait appel.
Décision :
Le Cour administrative d’appel (CAA) considère que le maire n’était pas compétent pour prendre cet arrêté, eu égard à l’existence d’une police spéciale de règlementation et de contrôle des conditions de détention et d’utilisation, des animaux vivants d’espèces non domestiques dans les établissements de spectacles itinérants confié à l’Etat. La police spéciale des établissements de spectacles itinérants relève du préfet.
De plus, s'il appartient au maire, responsable de l'ordre public sur le territoire de sa commune, de prendre les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques (article L2212-1 et L2212-2 du code général des collectivités territoriales), les interdictions édictées à ce titre doivent être strictement proportionnées à leur nécessité.
Or en l’espèce, le juge relève l’absence de risque de troubles graves et imminents à l’ordre public et de circonstances locales particulières justifiant l’interdiction de tout spectacle de cirque présentant des animaux vivants d’espèces non domestiques.
Au vu de ces éléments, la requête de la commune est rejetée. Il est enjoint à la commune d’abroger l’arrêté.
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Rappel de certaines dispositions de la loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes concernant la fin de l’utilisation d’animaux d’espèces non domestiques (sauvages) dans les spectacles itinérants (cirques itinérants) : - A compter du 1er décembre 2023, il sera interdit d'acquérir, de commercialiser et de faire se reproduire des animaux appartenant aux espèces non domestiques en vue de les présenter au public dans des établissements itinérants (article L. 413-10 du code de l’environnement). - A compter du 1er décembre 2028, seront interdits la détention, le transport et les spectacles incluant des espèces d'animaux non domestiques, dans les établissements itinérants (article L. 413-10 du code de l’environnement). - A compter du 1er décembre 2023, il sera interdit de détenir des ours et des loups, y compris hybrides, en vue de les présenter au public à l'occasion de spectacles itinérants (article L.413-14 du code de l’environnement).
De plus, une circulaire du 8 décembre 2021 du ministère de l’intérieur relative à la médiation et accompagnement des professions foraines et circassiennes rappelle que : « (…) l'interdiction d'espèces non domestiques, qui entrera en vigueur après une période de transition, n'empêche pas la présentation par les cirques d'espèces domestiques. Par conséquent, le cadre juridique en vigueur ne permet pas aux maires de prendre des interdictions générales d'installations fondées sur la simple présence d'animaux. »
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