Les conséquences du franchissement du seuil de 20 000 habitants pour les communes
Cet article constitue le dernier volet des fiches précédemment présentées sur les conséquences du franchissement du seuil de population (500 et 1 000 habitants – Mensuel n° 321 d’octobre 2022 ; 3500 et 10 000 habitants - Mensuel n° 324 de janvier 2023).
Le nombre d’habitants étant déterminant pour définir les règles applicables aux collectivités, il convient au préalable de rappeler que trois définitions de la population ont été définies par le code général des collectivités territoriales (CGCT) : la population municipale en matière électorale (article R.2151-3), la population totale pour l’assiette de l’impôt (article R.2151-2) et la population DGF pour la détermination de cette dotation (article L.2334-2).
A noter également, dans un objectif de stabilisation des règles applicables à l'exercice des mandats municipaux et au fonctionnement des conseils municipaux, l’article R.2151-4 du CGCT précise que la population de référence est celle authentifiée avant le renouvellement intégral du conseil municipal et qu'elle reste valable pour la durée du mandat indépendamment des variations de population constatées par la suite. Les variations relatives au nombre d'habitants en cours de mandat sont donc neutralisées.
De même, l’article R.2151-2 du CGCT précise qu’« il convient de se référer au chiffre de la population totale pris en compte lors du dernier renouvellement intégral du conseil municipal » pour l’application des dispositions relatives aux conditions d’exercice des mandats municipaux.
Dans le cas où le seuil des 20 000 habitants est franchi, des règles particulières s’appliquent aux communes concernées entraînant des conséquences juridiques et financières.
Les conséquences juridiques
La présentation d’un rapport sur la situation en matière d’égalité femmes-hommes dans le débat d’orientation budgétaire
« Dans les communes de plus de 20 000 habitants, préalablement aux débats sur le projet de budget, le maire présente un rapport sur la situation en matière d'égalité entre les femmes et les hommes intéressant le fonctionnement de la commune, les politiques qu'elle mène sur son territoire et les orientations et programmes de nature à améliorer cette situation. Le contenu de ce rapport et les modalités de son élaboration sont fixés par décret ».
Ce rapport, issu de l’article 61 de la loi du 4 août 2014 sur l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, fait à la fois état de la politique d’égalité professionnelle en interne de la collectivité concernée, mais aussi du bilan des orientations pluriannuelles et des programmes favorisant l’égalité entre les femmes et les hommes dans les politiques publiques.
Le décret n°2015-761 du 24 juin relatif au rapport sur la situation en matière d’égalité entre les femmes et les hommes précise les modalités d’élaboration de ces deux volets :
- Un volet interne relatif à la politique des ressources humaines de la collectivité en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, réalisé à partir de données « relatives au recrutement, à la formation, au temps de travail, à la promotion professionnelle, aux conditions de travail, à la rémunération, à l’articulation entre vie personnelle et vie professionnelle ».
- Un volet territorial relatif aux politiques publiques de nature à favoriser l’égalité sur son territoire, notamment en réalisant un bilan des « actions conduites à cette fin dans la conception, la mise en œuvre et l’évaluation des politiques publiques ». Ce dernier peut également comporter une analyse de la situation économique et sociale en matière d’inégalités entre les femmes et les hommes, à partir d’un diagnostic fondé sur les interventions relevant de sa compétence et sur les données des bénéficiaires de ses politiques.
La mise en place d’un site cinéraire
Les communes de 20 000 habitants et plus doivent disposer d’un site cinéraire destiné à l’accueil des cendres des personnes décédées dont le corps a donné lieu à une crémation (article L.2223-1 du CGCT).
La mission d’information et d’évaluation sur un intérêt communal ou l’évaluation d’un service public
A partir de 20 000 habitants, le conseil municipal peut créer une « mission d'information et d'évaluation, chargée de recueillir des éléments d'information sur une question d'intérêt communal ou de procéder à l'évaluation d'un service public communal » (article L.2121-22-1 du CGCT).
Cette commission ne peut être créée que si un sixième des conseillers municipaux le demandent.
Le règlement intérieur fixe :
- les règles de présentation et d'examen de la demande de constitution de la mission,
- les modalités de fonctionnement,
- les modalités de sa composition dans le respect du principe de la représentation proportionnelle,
- la durée de la mission qui ne peut excéder six mois à compter de la date de la délibération qui l'a créée,
- les conditions dans lesquelles la mission remet son rapport aux membres du conseil municipal.
La possibilité de mettre en place des conseils de quartier
Les communes de 20 000 à 79 999 habitants ont la possibilité de mettre en place des conseils de quartier conformément aux dispositions de l’article L.2143-1 du CGCT qui l’impose aux communes de 80 000 habitants.
Le conseil municipal doit fixer un périmètre pour chaque quartier. Chaque quartier est doté d’un conseil de quartier dont le conseil municipal fixe la composition, la dénomination et les modalités de fonctionnement.
Chaque conseil de quartier peut faire des propositions sur son quartier ou sur la commune. Le maire peut le consulter ou l’associer à l’élaboration, à la mise en œuvre et à l’évaluation des actions intéressant le quartier, en particulier celles menées au titre de la politique de la ville.
Les conséquences sur le retrait des délégations
Dans les communes de 20 000 habitants au moins, lorsque le maire retire les délégations à un adjoint qui avait interrompu son activité professionnelle pour exercer son mandat, la commune continue à lui verser son indemnité de fonction pendant trois mois au maximum dans le cas où il ne retrouve pas d’activité professionnelle (article L.2123-24 V du CGCT).
Les conséquences financières
L’évolution des indemnités de fonction du maire et des adjoints
L’article L.2123-17 du CGCT dispose que : « Les fonctions de maire, d’adjoint et de conseiller municipal sont gratuites ». Toutefois, afin de compenser les pertes de revenus induites par l’exercice des fonctions municipales, le législateur a prévu un régime d’indemnités de fonction définis aux articles L.2123-20 à L.2123-24-1 du CGCT.
Le montant total des indemnités effectivement votées par le conseil municipal ne doit pas excéder le montant total de l’enveloppe globale autorisée. Cette enveloppe indemnitaire globale autorisée est déterminée en additionnant l’indemnité maximale autorisée du maire et l’indemnité maximale autorisée par adjoint, multipliée par le nombre d’adjoints ayant reçu délégation. Les indemnités maximales pour l’exercice effectif des fonctions sont déterminées en pourcentage de l’indice brut terminal de la fonction publique (indice brut terminal fixé à 1027 au 01/07/2022, soit 4 025.53 € mensuels) et varient selon la population des communes. Pour la strate démographique des 20 000 à 49 999 habitants, le taux est de 90 % pour le maire et de 33 % pour les adjoints.
L’évolution des concours financiers de l’Etat : la dotation globale de fonctionnement
Chaque année l’Etat attribue aux communes un ensemble de concours financiers dont plusieurs font référence à la strate démographique pour en déterminer le montant. Pour estimer le montant des dotations versées, l’Etat prend en compte la population DGF des communes qui s’obtient en rajoutant à la population INSEE publiée au 1er janvier de l’année, le nombre de résidence secondaires.
Conséquences sur la dotation forfaitaire
La dotation forfaitaire a été créée pour contribuer à la compensation des charges générales des collectivités. Cette dotation compte deux variables. La première fluctue selon la population DGF de la commune (nombre d’habitants au 1er janvier de l’année + 1 habitant par résidence secondaire) et la seconde, servant à financer les réallocations internes de l’enveloppe nationale de la DGF, est écrêtée selon des conditions de potentiel fiscal (bases brutes de la commune de N-1 pondérées par les taux moyens de N-1). Cet écrêtement est suspendu pour l’année 2023.
Le franchissement d’une strate démographique n’a, en tant que tel, aucune conséquence sur la dotation forfaitaire. Toutefois, l’augmentation de la population de la commune conduira à une augmentation de son montant.
Conséquences sur les dotations de péréquation
Les dotations de péréquation sont versées aux collectivités les plus défavorisées. Elles ont pour but de réduire les inégalités de ressources des collectivités par rapport à leurs charges. Pour les communes, il s’agit de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU), de la dotation de solidarité rurale (DSR) et de la dotation nationale de péréquation (DNP).
Sur la dotation de solidarité urbaine (DSU)
Pour apprécier leur éligibilité à la DSU, les communes de 10 000 habitants et plus sont classées par ordre décroissant, selon un indice synthétique calculé à partir de divers indicateurs financiers que sont : le potentiel financier par habitant, le nombre de logements sociaux et la proportion par logement de personnes bénéficiant de prestations logements et le revenu moyen des habitants.
Les communes dont le potentiel financier par habitant est supérieur à deux fois et demie le ratio moyen des communes de 10 000 habitants et plus ne peuvent pas être éligibles à la DSU. Après application de cette exclusion d’éligibilité, sont éligibles les deux premiers tiers des communes de 10 000 habitants et plus, classées par ordre décroissant de la valeur de l’indice synthétique, soit 700 communes en 2022.
Pour information, une commune qui cesse d’être éligible perçoit, à titre de garantie non renouvelable, une dotation égale à 50 % du montant perçu l’année précédente.
La détermination du montant attribué au titre de la DSU repose sur plusieurs critères, dont la population DGF. Le franchissement d’une strate démographique n’aura donc pas de conséquence en tant que tel, mais une augmentation de la population devrait conduire à une hausse de cette attribution, sous réserve de l’impact de cette hausse sur les autres critères.
Sur la dotation nationale de péréquation (DNP)
Cette dotation prend pour appui, pour son éligibilité mais aussi son calcul, sur plusieurs indicateurs, notamment le potentiel financier, le potentiel fiscal et l’effort fiscal. Ramenés à l’habitant, ces indicateurs sont comparés à des ratios moyens classés par strates démographiques.
En franchissant le seuil de 20 000 habitants, la commune passe donc de la strate 9 (15 000 à 999 habitants) à la strate 10 (20 000 à 34 999 habitants). Les ratios de la strate supérieure auxquels seront comparés les indicateurs de la commune seront, de fait, plus élevés puisque cette dernière comprend des communes de plus grande taille. Ce changement de strate devrait donc avoir un effet positif sur la part principale de la dotation nationale de péréquation.
L’évolution des modalités d’appréciation du déficit du compte administratif
L’article L.1612-14 du CGCT prévoit : « lorsque l'arrêté des comptes des collectivités territoriales fait apparaître dans l'exécution du budget, après vérification de la sincérité des inscriptions de recettes et de dépenses, un déficit égal ou supérieur à 10 % des recettes de la section de fonctionnement s'il s'agit d'une commune de moins de 20 000 habitants et à 5 % dans les autres cas, la chambre régionale des comptes, saisie par le représentant de l'Etat, propose à la collectivité territoriale les mesures nécessaires au rétablissement de l'équilibre budgétaire, dans le délai d'un mois à compter de cette saisine ».
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