Loi asap : les dispositions relatives à la commande publique
Article
La loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique (ASAP) a pour objectifs de rapprocher l’administration du citoyen, de simplifier les démarches des particuliers ou bien encore d’accélérer les procédures administratives.
Plusieurs de ses mesures ont pour objet de simplifier la commande publique. Elles sont présentées dans la présente fiche.
- Le relèvement temporaire à 100 000 € HT du seuil de dispense de procédure pour les marchés de travaux
- L’ajout de l'intérêt général parmi les hypothèses permettant de déroger aux procédures
- La création d'un dispositif de circonstances exceptionnelles
- L’extension du régime d'exclusion des marchés de services juridiques
- Autres mesures de simplification
Le relèvement temporaire à 100 000 € HT du seuil de dispense de procédure pour les marchés de travaux
Dans l’objectif de faciliter la relance économique par les chantiers publics, l’article 142 relève de 40 000 à 100 000 € HT le seuil de dispense de publicité et de mise en concurrence pour la conclusion des marchés publics de travaux.
Avec cette mesure adaptée et strictement limitée dans le temps, jusqu’au 31 décembre 2022, les acheteurs publics pourront contracter plus rapidement avec des entreprises et notamment des PME. Ils restent néanmoins soumis à l’obligation de publier les données essentielles du marché (identité de l’attributaire, montant du marché etc) sur le profil d’acheteur, c'est-à-dire une plateforme de dématérialisation, dans les conditions définies à l’article R.2196-1 du code de la commande publique.
L’ajout de l'intérêt général parmi les hypothèses permettant de déroger aux procédures
L’article 131 I 1° modifie l'article L.2122-1 du code de la commande publique, en ajoutant le motif d’intérêt général parmi les hypothèses de passation d’un marché public sans publicité ni mise en concurrence. Ce principe n’est néanmoins pas d’application immédiate, car il doit encore être précisé dans la partie réglementaire du code, aux articles R.2122-1 et suivants.
La création d'un dispositif de circonstances exceptionnelles
L’article 132 a pour objectif de pérenniser les mesures mises en place pendant l’état d’urgence sanitaire, afin de pouvoir réagir plus rapidement et plus efficacement à la survenance de circonstances exceptionnelles nouvelles. Le nouveau dispositif est codifié aux articles L.2711-1 à L.2711-8 du code de la commande publique.
Il permettra notamment :
- d’aménager les modalités pratiques de la consultation (visites de chantier, délais de remise des plis etc), sans toutefois modifier les conditions de la mise en concurrence ;
- de prolonger les contrats qui arrivent à échéance pendant la période de circonstances exceptionnelles, lorsque l’organisation d’une procédure de lancement d’un nouveau marché ne peut pas être mise en œuvre ;
- de proroger, de façon proportionnée, le délai d’exécution des marchés lorsque l’exécution des prestations concernées en temps et en heure occasionnerait pour le titulaire une charge manifestement excessive.
Surtout, quelles que soient les clauses du contrat, les entreprises ne pourront pas être sanctionnées en cas de difficulté d'exécution liées à la crise. Elles bénéficieront au contraire de l’exonération des pénalités de retard et de l’interdiction de l'exécution aux frais et risques du titulaire défaillant.
A titre d'exemple, l’article L.2711-5 dispose que « les marchés publics dont le terme intervient pendant la période de circonstances exceptionnelles peuvent être prolongés par avenant au-delà de la durée prévue par le contrat lorsque l'organisation d'une procédure de mise en concurrence ne peut être mise en œuvre ». De même, l’article L.2711-3 prévoit que « lorsque les modalités de la mise en concurrence prévues dans les documents de la consultation des entreprises ne peuvent être respectées par l'acheteur, celui-ci peut apporter en cours de procédure les adaptations nécessaires à la poursuite de la procédure, dans le respect du principe d'égalité de traitement des candidats ».
Là encore, ces dispositions ne sont pas d’application immédiate, car nécessitant la parution de décrets d’application, qui paraitront au cas par cas en cas de survenance de circonstances exceptionnelles, et qui seront codifiées dans la partie réglementaire du code.
L’extension du régime d'exclusion des marchés de services juridiques
L’article 140 prévoit l’exclusion des procédures de passation des marchés, les services juridiques de représentation légale d’un client par un avocat dans le cadre d’une procédure juridictionnelle et les services de consultation juridique qui se rapportent à un contentieux existant ou à venir, et permettent ainsi aux acheteurs publics de passer de tels contrats de gré à gré.
Ces deux nouveaux motifs d’exclusion sont codifiés aux d) et e) de l'article L.2512-5 du code de la commande publique.
Les services de consultation juridique non liés à un contentieux existant ou à venir demeurent par contre soumis aux procédures de passation des marchés.
Autres mesures de simplification
L’assouplissement du dispositif de réservation des marchés publics en faveur des structures d’insertion de personnes handicapées ou défavorisées
L’article 141 modifie l’article L.2113-14 du code de la commande publique, qui dispose désormais qu’un acheteur public peut réserver un même marché ou un même lot d’un marché à la fois à des entreprises adaptées (EA) à des établissements et services d'aide par le travail (ESAT) et à des structures d'insertion par l'activité économique (SIAE).
Cette nouvelle disposition a pour conséquence concrète de mettre en concurrence ces deux types de structures car dans le régime antérieur, un marché ou un lot pouvait être réservé soit à des EA et des ESAT soit à des SIAE, mais pas aux deux en même temps.
La facilitation de la poursuite d’activité des entreprises en redressement judiciaire
Les articles 131 I 5° et 131 I 8° ont pour objet de faciliter la poursuite d’activité des entreprises en redressement judiciaire. Ainsi, les 3° des articles L.2141-3 et L.3123-3 du code de la commande publique sont modifiés pour intégrer des solutions déjà consacrées par la jurisprudence, à savoir qu'une entreprise en redressement judiciaire pouvant justifier avoir été habilitée à poursuivre son activité pendant la durée prévisible du contrat, puisse candidater valablement à un contrat de commande publique.
La possibilité de réserver une partie des marchés globaux aux PME et artisans
Les articles 131 I 3° et 4° instaurent la possibilité de réserver une partie des marchés globaux, c'est-à-dire les contrats confiant à un même opérateur économique, sous certaines conditions, une mission globale portant sur la conception et la construction d’un ouvrage (marchés de conception-réalisation, marchés globaux de performance et marchés globaux sectoriel) aux PME et aux artisans.
Ainsi, le nouvel article L.2171-8 prévoit que le titulaire de ces marchés globaux doit confier à des PME ou des artisans une quote-part minimale des prestations, fixée par décret (mais le décret, là encore, qui sera codifié dans la partie réglementaire du code, n’est pas encore paru). Par ailleurs, en application du nouvel article L.2152-9, cette quote-part doit obligatoirement faire partie des critères d’attribution.
La facilitation de la modification des contrats en cours d’exécution conclus avant le 1er avril 2016
L’article 133 étend aux contrats conclus avant le 1er avril 2016 la possibilité d’être modifiés dans les conditions définies par le code de la commande publique. Jusqu’à présent, la modification de ces contrats relevait de l’article 20 de l’ancien code des marchés publics (CMP) de 2006, qui ne prévoyait que deux possibilités d’avenant :
- l’absence de bouleversement économique du marché (la jurisprudence tolérait une augmentation maximale d’environ 15 % par rapport au montant initial) ;
- la présence de sujétions techniques imprévues ne résultant pas du fait des parties.
Désormais, ces contrats anciennement signés bénéficient des mêmes conditions de modification que les autres marchés, prévus à l’article L.2194-1 du code de la commande publique précisé aux articles R.2194-1 et suivants, à savoir :
- les modifications ont été prévues dans les documents contractuels initiaux ;
- des travaux, fournitures ou services supplémentaires sont devenus nécessaires ;
- les modifications sont rendues nécessaires par des circonstances imprévues ;
- un nouveau titulaire se substitue au titulaire initial du marché ;
- les modifications ne sont pas substantielles
- les modifications sont de faible montant (seuil de 15 % pour les marchés de fournitures et de services et de 20 % pour les marchés de travaux).
Pour aller plus loin : tableau récapitulatif des principales dispositions de la loi ASAP relatives à la commande publique.
Annexe : tableau récapitulatif des dispositions de la loi ASAP simplifiant la commande publique
Principales mesures |
Articles concernés de la loi |
Relèvement temporaire à 100 000 € HT du seuil de dispense de procédure pour les marchés de travaux. |
142 |
Ajout de l’intérêt général parmi les hypothèses permettant de déroger aux procédures. |
131 I 1° modifiant l’article L.2122-1 du code de la commande publique. Articles réglementaires à paraître. |
Création d’un dispositif de circonstances exceptionnelles. |
132 codifié aux articles L.2711-1 à L.2711-8 du code de la commande publique. Articles réglementaires à paraître au cas par cas, en cas de survenance des circonstances exceptionnelles. |
Extension du régime d’exclusion des marchés de services juridiques. |
140 modifiant l’article L.2512-5 du code de la commande publique. |
Assouplissement du dispositif de réservation des marchés publics en faveur des structures d’insertion de personnes handicapées ou défavorisées. |
141 codifié à l’article L.2113-14 du code de la commande publique. |
Facilitation de la poursuite d’activité des entreprises en redressement judiciaire. |
131 I 5° et 131 I 8° codifiés aux articles 3° des articles L.2141-3 (marchés) et L.3123-3 (concessions) du code de la commande publique |
Possibilité de réserver une partie des marchés globaux aux PME et artisans. |
131 I 3° et 131 I 4° codifiés aux articles L.2171-8 et L.2152-9 du code de la commande publique. Article réglementaire à paraître pour déterminer la quote-part minimale des prestations qui seront obligatoirement dévolues à des PME et artisans. |
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133 |
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