L’organisation d’un événement culturel sur le domaine public
Article
L’été est une période propice à l’organisation de manifestations et festivités en tout genre sur le domaine public des communes.
Pour que l’événement se déroule conformément aux réglementations en vigueur, l’organisateur, qu’il s’agisse d’une personne physique ou d’une association, doit respecter un certain nombre d’obligations.
Le maire doit également veiller, en tant qu’autorité de police, à ce que les festivités aient lieu dans des conditions optimales de sécurité.
Cette Fiche technique aborde l’ensemble de ces points.
Sur les obligations de l’organisateur de la manifestation
L’occupation du domaine public
L’obtention d’un titre d’occupation
L’organisateur d’un événement qui doit se dérouler sur le domaine public communal, doit obtenir l’autorisation municipale.
C’est ce qui résulte de l’article L.2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques (CGPPP) aux termes duquel « nul ne peut, sans disposer d’un titre l’y habilitant, occuper une dépendance du domaine public (…) ».
Le titre d’occupation devra être approuvé par le conseil municipal, à moins que le maire ne soit titulaire d’une délégation pour « décider de la conclusion et de la révision du louage de choses pour une durée n'excédant pas douze ans » (article L.2122-22 5° code général des collectivités territoriales – CGCT).
L’autorisation prend la forme d’une autorisation unilatérale d’occupation en cas d’utilisation ponctuelle (en revanche, en cas d’utilisation régulière, il convient de conclure une convention de mise à disposition).
A noter : Lorsque la manifestation a lieu sur une dépendance du domaine public routier, cette autorisation revêtira la forme d’une autorisation de voirie (article L.113-2 du code de la voirie routière) :
- un permis de stationnement, si l’occupation a lieu sans emprise dans le sous-sol du domaine occupé ;
- une permission de voirie en cas d’ancrage dans le domaine public.
Le paiement d’une redevance d’occupation
L’autorisation d’occuper le domaine public doit être délivrée à titre onéreux puisque l’article L.2125-1 du CGPPP indique que « toute occupation ou utilisation du domaine public d'une personne publique […] donne lieu au paiement d'une redevance […] ».
Le montant de la redevance est fixé par le conseil municipal ou par ceux du maire s’il est titulaire d’une délégation en ce sens (article L.2122-22 2° du CGCT), en fonction :
- d’une part fixe, qui correspond à la valeur locative d’une propriété privée comparable à la dépendance du domaine public occupée ;
- et d’une part variable, déterminée selon les avantages retirés par le titulaire du titre d’occupation du domaine public (article L.2125-3 du CGPPP et Guide pratique du CGPPP).
Toutefois, les associations bénéficient d’un régime dérogatoire puisque les groupements « à but non lucratif qui concourent à la satisfaction d'un intérêt général » peuvent se voir accorder la gratuité (article L.2125-1 alinéa 3 du CGPPP).
La déclaration en préfecture en cas de rassemblement exclusivement festif à caractère musical
Un rassemblement exclusivement festif à caractère musical, organisé par des personnes privées, dans un lieu qui n’est pas au préalable aménagé à cette fin, doit être déclaré auprès du préfet s’il répond à l’ensemble des caractéristiques suivantes (articles L.211-5 et R.211-2 du code de la sécurité intérieure – CSI) :
- le rassemblement donne lieu à la diffusion de musique amplifiée ;
- le nombre prévisible des personnes présentes sur leurs lieux dépasse 500 ;
- le rassemblement est annoncé par voie de presse, affichage, diffusion de tracts ou par tout moyen de communication ou de télécommunication ;
- il est susceptible de présenter des risques pour la sécurité des participants, en raison de l'absence d'aménagement ou de la configuration des lieux.
La déclaration, qui doit être déposée par l’organisateur au plus tard un mois avant la date prévue pour le rassemblement, doit contenir certaines informations et être accompagnée de certaines pièces listées aux articles R.211-3 et R.211-4 du CSI.
La déclaration en mairie en cas de manifestation à but lucratif et la mise en place d’un service d’ordre
L’organisateur d’une manifestation sportive, récréative ou culturelle à but lucratif dont l’effectif atteint plus de 1 500 personnes1, est tenu d’en faire la déclaration en mairie, un an au plus et, sauf urgence motivée, un mois au moins avant la date de la manifestation (article R.211-22 du CSI).
Cette déclaration doit mentionner, outre le nom, l'adresse et la qualité de l’organisateur (article R.211-23 alinéa 1er du CSI) :
- la nature de la manifestation,
- le jour et l'heure de sa tenue,
- le lieu, sa configuration et sa capacité d'accueil,
- le nombre de personnes concourant à la réalisation de la manifestation ainsi que le nombre de spectateurs attendus.
Elle doit également indiquer les mesures envisagées par les organisateurs en vue d'assurer la sécurité du public et des participants, et notamment toutes précisions utiles sur le service d'ordre éventuellement mis en place par les organisateurs (article R.211-23 alinéa 2).
Si, compte tenu de l’importance du public attendu, de la configuration des lieux et des circonstances propres à la manifestation, le maire estime que les mesures envisagées par l’organisateur pour assurer la sécurité sont insuffisantes, il pourra lui imposer la mise en place d'un service d'ordre ou le renforcement du service d'ordre prévu.
Le maire devra notifier les mesures prescrites quinze jours au moins avant le début de la manifestation (sauf si la déclaration a été faite moins d'un mois avant celle-ci – cf. supra article R.211-22 du CSI) et les communiquer au préfet.
L’autorisation de la SACEM
Une personne qui organise un concert ou une manifestation au cours de laquelle de la musique est diffusée, doit obtenir une autorisation de la SACEM.
Le montant des droits d’auteur dépend des conditions d’organisation de l’évènement, en fonction du budget des dépenses et du prix d’entrée.
Cette autorisation peut être obtenue en ligne (www.sacem.fr).
L’autorisation d’ouvrir un débit de boissons temporaire
Les buvettes ouvertes à l’occasion des manifestations culturelles ou récréatives doivent être autorisées par le maire.
Aux termes de l’article L.3334-2 du code de la santé publique (CSP) en effet, « les personnes qui, à l’occasion (…) d’une fête publique, établissent des cafés et débits de boissons (…) doivent obtenir l’autorisation municipale.
Les associations qui établissent des cafés et débits de boissons pour la durée des manifestations publiques qu’elles organisent (…) doivent obtenir l’autorisation de l’autorité municipale dans la limite de cinq autorisations annuelles ».
A noter : la notion de fête publique
Si la doctrine ministérielle a longtemps considéré que l'expression « fête publique » devait être entendue dans le sens d'une manifestation nationale ou locale de tradition ancienne ininterrompue (Rép. Min. n° 12137 du 20 mai 2004, JO Sénat du 15 juillet 2004), il semble à présent qu’elle ait une interprétation plus large de cette expression, et l’étende aux « manifestations exceptionnelles autres que celles mentionnées à l'article L.3334-1 (fêtes publiques, bals publics, représentations théâtrales, ventes de charité, kermesses, etc.) (…) » (Rép. Min. n° 21354 du 8 décembre 2011, JO Sénat du 10 mai 2012).
Sous réserve de l’appréciation souveraine du juge, un événement culturel (comme un festival de musique) organisé par une personne physique pourrait être considéré comme une manifestation exceptionnelle.
Dans un débit de boissons temporaire, il ne peut être vendu ou offert, sous quelque forme que ce soit, que des boissons des groupes un et trois tels que définis à l’article L.3321-1 du CSP :
- groupe 1 : boissons sans alcool : eaux minérales ou gazéifiées, jus de fruits ou de légumes non fermentés ou ne comportant pas, à la suite d'un début de fermentation, de traces d'alcool supérieures à 1,2 degré, limonades, sirops, infusions, lait, café, thé, chocolat ;
- groupe 3 : boissons fermentées non distillées et vins doux naturels : vin, bière, cidre, poiré, hydromel, auxquelles sont joints les vins doux naturels, ainsi que les crèmes de cassis et les jus de fruits ou de légumes fermentés comportant de 1,2 à 3 degrés d'alcool, vins de liqueur, apéritifs à base de vin et liqueurs de fraises, framboises, cassis ou cerises, ne titrant pas plus de 18 degrés d'alcool pur ;
Le respect de la tranquillité publique
Aux termes de l’article R.1334-31 du CSP, « aucun bruit particulier ne doit, par sa durée, sa répétition ou son intensité, porter atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l'homme, dans un lieu public ou privé, qu'une personne en soit elle-même à l'origine ou que ce soit par l'intermédiaire d'une personne, d'une chose dont elle a la garde ou d'un animal placé sous sa responsabilité ».
L’organisateur d’une manifestation doit veiller à ce que celle-ci ne cause pas de nuisances au voisinage, faute de quoi, le maire devrait intervenir en faisant usage de ses pouvoirs de police (cf. infra).
Sur les mesures de police qui incombent au maire
Garantir la sécurité publique en réglementant la circulation des véhicules
Les pouvoirs de police générale que le maire détient lui imposent de prendre les mesures nécessaires pour garantir la sécurité publique, et en particulier assurer « la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques » (article L.2212-2 1° du code général des collectivités territoriales – CGCT).
De surcroît, aux termes de l’article L.2213-1 du même code, « le maire exerce la police de la circulation sur les routes nationales, les routes départementales et les voies de communication à l'intérieur des agglomérations, sous réserve des pouvoirs dévolus au représentant de l'Etat dans le département sur les routes à grande circulation. A l'extérieur des agglomérations, le maire exerce également la police de la circulation sur les voies du domaine public routier communal et du domaine public routier intercommunal, sous réserve des pouvoirs dévolus au représentant de l'Etat dans le département sur les routes à grande circulation ».
Ce pouvoir de police spéciale, sous réserve toutefois qu’il n’ait pas été transféré au président2 de l’EPCI compétent en matière de voirie, permet au maire, « par arrêté motivé, eu égard aux nécessités de la circulation et de la protection de l'environnement :
1° [d’] interdire à certaines heures l'accès de certaines voies de l'agglomération ou de certaines portions de voie ou réserver cet accès, à certaines heures, à diverses catégories d'usagers ou de véhicules ;
2° [de] réglementer l'arrêt et le stationnement des véhicules ou de certaines catégories d'entre eux, ainsi que la desserte des immeubles riverains (…) » (article L.2213-2 du CGCT).
Garantir la tranquillité publique
Les nuisances générées dans le cadre d’un événement culturel de type concert ou festival pourraient être considérées comme des bruits de comportement
Ces bruits sont considérés comme gênants dès lors que leur durée, leur répétition ou leur intensité est excessive (article R.1334-31 du code de la santé publique).
Le constat de la nuisance se fait « à l’oreille », par un agent des forces de l’ordre ou par un agent municipal désigné par le maire, agréé et assermenté (articles L.1312-1 du CSP et R.571-92 du code de l'environnement).
Si l’infraction est avérée, le fauteur de trouble encourt la peine d’amende prévue pour les contraventions de la 3ème classe, soit 450 € au plus (article R.1337-7 du CSP).
De plus, la victime de la nuisance pourrait également engager une procédure civile visant à obtenir réparation du préjudice subi (articles 1240 et suivants du code civil).
Pour aller plus loin : La réparation des dommages causés à la voirie dans le cadre d’un événement organisé sur le domaine public
La commune peut demander le remboursement des frais nécessaires aux réparations d’une voie qui a subi des dégradations du fait de la circulation des camions qui apportent le matériel nécessaire au déroulement de la manifestation (matériel de sonorisation par exemple).
L’article L.141-9 du code de la voirie routière3 prévoit en effet que « toutes les fois qu'une voie communale entretenue à l'état de viabilité est habituellement ou temporairement soit empruntée par des véhicules dont la circulation entraîne des détériorations anormales, soit dégradée par des exploitations de mines, de carrières, de forêts ou de toute autre entreprise, il peut être imposé aux entrepreneurs ou propriétaires des contributions spéciales, dont la quotité est proportionnée à la dégradation causée.
Ces contributions peuvent être acquittées en argent ou en prestation en nature et faire l'objet d'un abonnement.
A défaut d'accord amiable, elles sont fixées annuellement sur la demande des communes par les tribunaux administratifs, après expertise, et recouvrées comme en matière d'impôts directs ».
Pour institution une telle contribution, la commune doit :
Apporter la preuve d'un entretien normal : dès lors que la commune peut apporter la preuve d'un entretien normal de la voie (travaux d'entretien ou de réfection récents), ou produire un état des lieux initial (par exemple avant le début des chantiers d'exploitation), établi soit contradictoirement avec les exploitants, soit unilatéralement par huissier, elle est en droit de demander la réparation des dommages par la ou les entreprises responsables.
Rechercher un accord amiable avant toute saisine du juge et avant l’expiration de l’année suivant celle où se sont produites les dégradations en cause (CAA de Douai, 31 mars 2015, n° 14DA00227).
En cas d’échec de la tentative d’accord amiable, saisir le tribunal administratif d’une demande de fixation de la contribution.
A peine d’irrecevabilité, cette demande doit nécessairement être présentée avant la fin de l’année civile qui suit celle de l’échec définitif de la tentative d’accord amiable (CE, 6 juin 2008, n° 299415).
Pour saisir utilement le tribunal administratif, il faut donc être en mesure :
- de prouver la recherche d’accord amiable ;
- de prouver l’échec de cette tentative d’accord amiable ;
- de déterminer la date à partir de laquelle la tentative d’accord amiable doit être regardée comme ayant définitivement échoué, dès lors qu’elle constitue le point de départ du délai de prescription
Il convient donc de procéder par échange de courrier afin de conserver une preuve des dates.
Demander une expertise :le président du tribunal saisi ordonnera, sur demande de la commune, une expertise aux fins de rassembler tous les éléments permettant d’appréhender la consistance et le coût des détériorations imputables à un usage anormal de la voie communale, compte tenu de son état de viabilité.
Fixer le montant de la contribution : c’est le tribunal qui fixe ce montant en se fondant sur le rapport final d’expertise.
Emettre un titre exécutoire : une fois le montant de la contribution fixé par le jugement, la commune émet, sans délai, un titre exécutoire aux fins de perception de la contribution.
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1 Cet effectif comprend le public et le personnel qui concourt à la réalisation de la manifestation, soit d'après le nombre de places assises, soit d'après la surface qui leur est réservée (même article R.211-22).
2En application de l’article L.5211-9-2 du CGCT, sauf opposition ou renonciation du président, les maires des communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre compétent en matière de voirie doivent notamment transférer au président de cet établissement les prérogatives qu'ils détiennent en matière de police de la circulation et du stationnement (articles L.2213-1 à L.2213-6-1 du CGCT).
3Ces dispositions sont applicables aux chemins ruraux (article L.161-8 du code rural et de la pêche maritime).
Nous vous rappelons que HGI-ATD ne répond qu'aux sollicitations de ses adhérents. Toute demande de documentation, conseil ou assistance ne respectant pas cette condition ne pourra aboutir.