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    Le transfert de la compétence gestion des eaux et milieux aquatiques au bloc communal

    La loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (MAPTAM) du 27 janvier 2014 a institué une nouvelle compétence obligatoire en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (GEMAPI) à destination du bloc communal.

    Alors que de nombreuses collectivités s’étaient déjà inscrites dans une démarche volontaire de lutte contre les inondations, notamment par le biais de syndicats de rivières, l’évolution en compétence obligatoire a suscité beaucoup d’interrogations.

    Cette fiche technique a donc pour objet de présenter les principales évolutions induites par cette nouvelle compétence en termes de contenu, de financement et de mise en œuvre.  

    Le contenu de la compétence GEMAPI

     L’article 56 de la loi MAPTAM fait de la GEMAPI une nouvelle compétence du bloc communal (communes et EPCI à fiscalité propre). Elle devient ainsi une compétence obligatoire pour les communautés de communes (article L.5214-16 du code général des collectivités territoriales - CGCT), les communautés d’agglomération (article L.5216-5), les communautés urbaines (article L.5215-20) et les métropoles (article L.5217-2).

    En vertu de l’article L.211-7 du code de l’environnement, cette compétence comprend les missions définies aux 1°, 2°, 5° et 8° du I, à savoir :

    1° L'aménagement d'un bassin ou d'une fraction de bassin hydrographique ;

    2° L'entretien et l'aménagement d'un cours d'eau, canal, lac ou plan d'eau, y compris les accès à ce cours d'eau, à ce canal, à ce lac ou à ce plan d'eau ;

    5° La défense contre les inondations et contre la mer ;

    8° La protection et la restauration des sites, des écosystèmes aquatiques et des zones humides ainsi que des formations boisées riveraines.

     Ces missions n’ont, pour l’heure, pas fait l’objet de précisions textuelles. En raisonnant a contrario, on peut toutefois indiquer que les autres missions visées à l’article L.211-7 ne sont pas intégrées à la compétence GEMAPI, ce qui exclut de cette compétence obligatoire :

    • L'approvisionnement en eau ;
    • La maîtrise des eaux pluviales et de ruissellement ou la lutte contre l'érosion des sols ;
    • La lutte contre la pollution ;
    • La protection et la conservation des eaux superficielles et souterraines ;
    • Les aménagements hydrauliques concourant à la sécurité civile ;
    • L'exploitation, l'entretien et l'aménagement d'ouvrages hydrauliques existants ;
    • La mise en place et l'exploitation de dispositifs de surveillance de la ressource en eau et des milieux aquatiques ;
    • L'animation et la concertation dans le domaine de la gestion et de la protection de la ressource en eau et des milieux aquatiques dans un sous-bassin ou un groupement de sous-bassins, ou dans un système aquifère, correspondant à une unité hydrographique.

    Ces missions peuvent néanmoins être prises en charge, à titre optionnel, par les communes et leurs EPCI.

    1.3 La compétence GEMAPI constitue un bloc dans lequel sont nécessairement incluses les actions visées au 1°, 2°, 5° et 8° de l’article L.211-7 précité.

    Pour autant, les communautés de communes n’exercent leurs compétences que pour la conduite d'actions d'intérêt communautaire (article L.5214-16 du CGCT).

    Il est donc possible de dissocier au sein des différentes missions de la GEMAPI des actions relevant des communes, de celles ayant vocation à être transférées à la communauté de communes, par le biais de la définition de l’intérêt communautaire (assise, par exemple, sur des critères physiques, dont la pertinence relève d’une approche technique). Pour rappel, l’intérêt communautaire est déterminé par le conseil communautaire statuant à la majorité des deux tiers de ses membres. Cette définition doit intervenir dans le délai de deux ans à compter du transfert de la compétence.

    Il convient de noter qu’une telle possibilité n’est pas ouverte au profit des autres EPCI à fiscalité propre.

    L’exercice de la compétence GEMAPI

    L’exercice des missions incluses dans la GEMAPI reste, comme aujourd’hui, conditionné à une déclaration d’intérêt général (DIG) des travaux à réaliser (Réponse ministérielle, n°4684, JO Assemblée Nationale, 17 juin 2014).

    Pour rappel, une DIG est une décision du préfet, prise après enquête publique, afin d’habiliter une personne publique à réaliser des travaux présentant un intérêt général ou un caractère d’urgence sur des propriétés privées.

    Le transfert obligatoire de cette compétence au bloc communal ne remet d’ailleurs pas en cause l’obligation pour les propriétaires riverains des cours d’eau non domaniaux de procéder à leur entretien régulier (Réponse ministérielle, n°0783S, JO Sénat, 22 mai 2014, p. 1165) : l’article L.215-14 du code de l’environnement qui prévoit une telle obligation perdure, tout comme l’article L.215-16 du même code qui permet à la collectivité compétente de procéder à cet entretien d’office, aux frais du riverain défaillant.

    De même, aucun transfert des pouvoirs de police en matière de prévention des inondations n’est prévu. Les mesures d’alerte et de secours, qui relèvent de la police administrative générale continuent donc à relever de la responsabilité des maires (article L.2212-2 du CGCT).

    En revanche, est prévu un mécanisme de mise à disposition des digues et barrages de l’État au profit de l’EPCI compétent (ou de la commune) dès lors que cet équipement a été construit ou aménagé en vue de prévenir les inondations (article L.566-12-1 du code de l’environnement). Mais l’Etat continue à assurer l’entretien des digues pour le compte de l’EPCI ou de la commune pour une durée de 10 ans à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi (jusqu’au 28 janvier 2026).

    Enfin, selon les services de l’État, le fait de rendre obligatoire la compétence GEMAPI ne devrait pas avoir pour effet de modifier les responsabilités en cas de dommages causés par des inondations, dès lors que les conditions de mise en œuvre de cette compétence sont inchangées.

    A ce titre, l’article L.562-8-1 du code de l’environnement précise que : “la responsabilité d'un gestionnaire d'ouvrages ne peut être engagée à raison des dommages que ces ouvrages n'ont pas permis de prévenir dès lors que les obligations légales et réglementaires applicables à leur conception, leur exploitation et leur entretien ont été respectées”. Ainsi, un gestionnaire de digues ne pourra pas être tenu pour responsable de la rupture d’une digue sous l’effet d’une crue « centennale » dès lors que la digue aura été conçue et entretenue pour résister à une crue dont la période de retour est de 50 ans.

    La date du transfert de la compétence GEMAPI

    La nouvelle rédaction de l’article L.211-7 du code de l’environnement indiquant que les communes sont compétentes en matière de GEMAPI entrera en vigueur au 1er janvier 2016. A compter de cette date, la compétence GEMAPI deviendra également une compétence obligatoire pour les communautés de communes (article L.5214-16 du CGCT), comme pour les communautés d’agglomération (article L.5216-5 du CGCT). En revanche, pour les métropoles (article L.5217-2 du CGCT), la compétence GEMAPI leur sera transférée à compter du 1er janvier 2015.

    Toutefois, l’article 59 de la loi MAPTAM indique que :

    “I. - Les conseils généraux, les conseils régionaux, leurs groupements ou les autres personnes morales de droit public qui assurent l'une des missions mentionnées aux 1°, 2°, 5° et 8° du I de l'article L.211-7 du code de l'environnement à la date de publication de la présente loi exercent les compétences qui s'y rattachent jusqu'au transfert de celles-ci à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, au plus tard jusqu'au 1er janvier 2018”.

     Selon une réponse ministérielle (n°40945, JO Assemblée Nationale, 20 mai 2014, p. 4706), cette disposition vise notamment les syndicats de rivière. Dès lors, les missions actuellement exercées par de telles structures ont vocation à continuer à l’être dans les mêmes conditions au plus tard jusqu’au 1er janvier 2018. Pour ces missions, le mécanisme de représentation-substitution (cf. 5) ne devrait  donc jouer qu’à compter du 1er janvier 2018.

    En revanche, se pose la question des autres missions de  la compétence GEMAPI, non transférées à un syndicat préexistant. En effet, deux solutions sont envisageables :
    - soit le report concerne l’intégralité de la compétence GEMAPI auquel cas les autres missions de cette compétence ne seront effectivement transférées aux communautés qu’à compter du 1er janvier 2018.
    - soit ce report ne concerne que les missions exercées par les structures préexistantes, auquel cas, le transfert des autres missions aux communautés devrait intervenir dès le 1er janvier 2016.

    Les conséquences de ces dispositions méritent donc d’être précisées par la doctrine ministérielle. Il parait néanmoins raisonnable de considérer que c’est la 2ème interprétation qui devrait prévaloir.

    Enfin, on indiquera qu’à l’inverse, la loi a prévu la possibilité pour les EPCI à fiscalité propre de prendre la compétence GEMAPI par anticipation (article 59 I dernier alinéa). Mais, dès lors qu’un syndicat exerce déjà tout ou partie des missions de la GEMAPI, cette faculté ne pourrait pas être mise en œuvre, puisque ces missions continueront à relever du syndicat jusqu’au 1er janvier 2018 (cf. ci-dessus).

    En toute hypothèse, une mission d’appui technique a été instituée par l’article 59 de la loi MAPTAM, destinée à accompagner la prise de compétence GEMAPI par les communes et les EPCI à fiscalité propre. Elle a pour objet d’émettre des recommandations sur l’identification et la définition d’outils utiles à l’exercice de la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations et devrait exercer ses missions jusqu’au 1er janvier 2018 (article 1er du décret n°2014-846 du 28 juillet 2014).

    La création d’une taxe sur les milieux aquatiques (article 1530 bis du CGI)

    La loi MAPTAM crée une nouvelle taxe, facultative, sur les milieux aquatiques. Elle peut être instituée par délibération adoptée avant le 1er octobre pour être applicable l’année suivante :

    •  par les communes qui exercent la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations ; 
    •  par les EPCI à fiscalité propre qui se substituent à leurs communes membres pour l'exercice de la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations. 

    Cette taxe n’a donc pas vocation à être partagée entre commune et EPCI à fiscalité propre. Les syndicats de rivière ne peuvent d’ailleurs pas instituer cette taxe mais ils pourront bénéficier de son produit au travers des contributions appelées auprès de leurs membres (Réponse ministérielle, n°51019, JO Assemblée Nationale, 6 mai 2014, p. 3700).

    Le produit de cette imposition est exclusivement affecté au financement des charges de fonctionnement et d'investissement, y compris celles constituées par le coût de renouvellement des installations ainsi que par le remboursement des annuités des emprunts, résultant de l'exercice de la compétence GEMAPI. Cette taxe peut financer l’ensemble des missions mentionnées à l’article L.211-7 du code de l’environnement, à l’exception de l’approvisionnement en eau et de la lutte contre la pollution.
    Son montant est en outre doublement plafonné : d’une part, il ne peut être supérieur à 40 € par habitant et par an, d’autre part, le produit voté doit être au plus égal au montant annuel prévisionnel de l’exercice de la compétence GEMAPI. Le suivi de cette taxe est assuré au sein d’un budget annexe spécial obligatoire.

    Par ailleurs, l’institution de cette taxe reste facultative : le financement de la compétence GEMAPI pourra donc être assuré, soit au travers de cette taxe, soit par le biais des budgets généraux des collectivités (Réponse ministérielle, n°4684, JO Assemblée Nationale, 17 juin 2014).

    En revanche, il ne sera plus possible d’appeler la participation de l’article L.151-36 du code rural et de la pêche maritime auprès des riverains des cours d’eau ayant rendu les travaux nécessaires ou y trouvant un intérêt, dès lors que ces travaux concernent les missions exercées au titre de la GEMAPI.

    Les conséquences du transfert de la compétence GEMAPI sur les structures existantes

    Le mécanisme dit de représentation substitution a vocation à jouer pour les communautés de communes, que celles-ci soient incluses totalement ou à cheval sur le territoire syndical (article L.5214-21 du CGCT). Dans cette hypothèse, la communauté de communes devient membre du syndicat, qui se transforme en syndicat mixte, s'il ne l'était déjà.
    Les délégués communautaires siègent au comité syndical au lieu et place des conseillers municipaux. Le nombre de délégués dont dispose la communauté est égal au nombre de délégués dont disposaient les communes avant la substitution (article L.5711-3 du CGCT).
    Enfin, l’application de ce mécanisme ne modifie ni les attributions du syndicat, ni le périmètre dans lequel il exerce ses compétences. Cela signifie que même si la communauté de communes est théoriquement pourvue des mêmes compétences, en pratique, c’est le syndicat qui continue à assurer l’exercice effectif de ces missions sur le territoire des communes soumises au mécanisme de représentation-substitution.
    A cet effet, les contributions au budget du syndicat seront versées par les communautés. Ces dernières pourront financer cette participation soit par la taxe sur les milieux aquatiques soit par le biais de leur budget général.
    Le mécanisme de représentation substitution ne jouera pour les communautés d’agglomération (article L.5216-7 I bis du CGCT) et les communautés urbaines (article L.5215-22 du CGCT) que si leur territoire est totalement inclus dans celui du syndicat.
    En effet, en cas de chevauchement de périmètre entre une communauté urbaine ou une communauté d’agglomération d’une part, et un syndicat d’autre part, le transfert de la compétence GEMAPI entrainera retrait des communes initialement membres du syndicat. Le retrait des communes est également la règle pour les métropoles qu’elles soient situées à cheval ou intégralement incluses dans le territoire syndical (article L.5217-7 du CGCT).
    Toutefois, rien n’interdira à ces EPCI de solliciter leur adhésion au syndicat dans un second temps, en limitant cette adhésion au seul territoire de la ou des communes initialement membres du syndicat. En effet, l’article L.5211-61 du CGCT prévoit expressément qu’en matière de gestion de l'eau et des cours d'eau, un EPCI à fiscalité propre peut adhérer à un syndicat de communes ou un syndicat mixte sur tout ou partie de son territoire ou à plusieurs syndicats situés chacun sur des parties distinctes de son territoire.

    La création des établissements publics d’aménagement et de gestion des eaux 

    L’article 57 de la loi MAPTAM introduit une nouvelle catégorie d’établissement public : les établissements publics d’aménagement et de gestion des eaux (EPAGE). Il s’agit d’un "groupement de collectivités territoriales constitué à l’échelle d’un bassin versant d’un fleuve côtier sujet à des inondations récurrentes ou d’un sous-bassin hydrographique d’un grand fleuve en vue d’assurer, à ce niveau, la prévention des inondations et des submersions ainsi que la gestion des cours d’eau non domaniaux. Cet établissement comprend notamment les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre compétents en matière de [GEMAPI]".
    "Dans le cadre de l’élaboration ou de la révision des SDAGE, le préfet coordonnateur de bassin détermine le bassin, les sous-bassins ou les groupements de sous-bassins hydrographiques qui justifient la création ou la modification de périmètre d’un EPTB [établissement public de bassin] ou d’un EPAGE".

    En l'absence de proposition émise dans un délai de deux ans à compter de l'approbation du prochain SDAGE (soit décembre 2017), le préfet coordonnateur de bassin engage la procédure de création d'un EPTB ou d’un EPAGE sur le bassin, le sous-bassin ou le groupement de sous-bassins hydrographiques qui le justifie.

    Les syndicats de rivière existants peuvent donc avoir vocation à se transformer en EPAGE. A cet effet, le projet de décret relatif aux EPAGE et EPTB institue une procédure de transformation d’un syndicat mixte existant en EPAGE dès lors qu’il répond par son statut, son périmètre et son objet aux caractéristiques d’un EPAGE. Ce texte (et la procédure de transformation prévue) n’est toutefois pas encore finalisé.

     



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    Auteur :

    Sébastien VENZAL, Service Juridique

    Paru dans :

    Info-lettre n°139

    Date :

    1 janvier 2015

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